Paroles de Benoît le breton
- francoishada
- 23 oct. 2024
- 2 min de lecture

Je me rendais à mon travail. Je vis un homme à terre, la tête dans le caniveau. Un joggeur l’enjamba. L’homme appelait au secours, tendait une main dans le vide. Une passante lui demanda si tout allait bien. La question plongea le SDF dans le mutisme. Puis il appela de nouveau au secours.
Je me suis alors approché de lui, je me suis accroupi et lui ai pris la main. Ne voyez pas dans ce geste une forme de charité facile. Je n’y ai même pas réfléchi.
J’ai aidé cet homme à se relever, puis je lui ai demandé de quoi il avait besoin. « Un café, s’il te plaît. » Je l’emmenais alors dans un café. Le garçon de café me fit comprendre qu’il ne voulait pas de ce client. Nous sommes alors allés dans un fast food. Je lui ai offert un café. Je lui ai proposé un déjeuner. Mais il avait du diabète.
Nous avons alors échangé, sur tout et sur sa vie, son parcours qui partant de Bretagne l’avait fait échouer sur les trottoirs de Paris. Il venait pour un job qui en réalité n’existait pas. Plus d’argent, plus de logement, plus de quoi aller ailleurs. D’ailleurs pour y faire quoi? Et très vite, les premières nuits dehors, la soupe populaire, la violence entre SDF, être constamment sur ses gardes, pour qu’on ne lui vole pas ses derniers biens, pour pouvoir rester dans son spot. La dégringolade au début, puis plus rien, si ce n’est le fond du fond.
Il me dit qu’il s’appelait Benoît. Je l’appelle Benoît le Breton. Il avait besoin d’un peu d’argent pour rentrer en Bretagne, prendre un mobile home ou un baraquement pour premier logement, trouver un job dans une ferme, se refaire… Il avait besoin de 300€. Je lui ai proposé d’acheter son billet de train et de prendre contact pour un logement. Il m’a dit qu’il préférait du cash, pour être libre de ses mouvements, mais il promit de m’écrire une fois installé en Bretagne.
Je lui ai passé cet argent et mon adresse. Il m’a de nouveau promis de m’écrire pour me dire où il en serait. Je n’ai plus entendu parlé de lui.
On pourra me taxer de naïveté ou de m’être acheté une bonne conscience pour un peu d’argent. Qu’importe? Benoît, lui, vivait dans la rue.
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