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Un mal, des mots…


« Mettre des mots sur les maux » : C’est la devise signature de l’association SOS Amitié. Ou plutôt ça l’était, pendant vingt ans, jusqu’en 2024 où nous l’avons échangée pour « Répondre présent », qui se veut plus actif, plus tourné vers l’autre et sa demande de lien.

SOS Amitié, quesaco ? Vous pensez vaguement au film « Le père Noel est une ordure » …et vous avez raison ! 2000 bénévoles au téléphone, à l’écoute de toutes les détresses, jour et nuit …dont moi, qui ne m’appelle pas Thérèse, ni aucun autre nom : écoutants comme appelants sont anonymes, et les échanges confidentiels.

Et c’est justement cet anonymat qui libère la parole, qui permet aux appelants de déposer leur souffrance, leur anxiété, leur fatigue, leur colère, leur plainte, leur désespoir, leur chagrin … dans l’oreille neutre et bienveillante de l’écoutant, qui reçoit et accueille tous ces mots sans jugement ni bon conseil.

Des mots…parfois juste des pleurs, ou des cris, ou des silences…parfois un torrent de mots qui masque une crise d’angoisse, les phrases délirantes des gens enfermés dans leur pathologie, les mots crus de ceux qui se montent des scenarios fantasmés, les mots désespérants des gens qui n’ont personne à qui parler, ou les mots approximatifs de ceux qui n’ont pas les mots….

Les mots sont des actes, disent les psychanalystes.

Dire, c’est donner un cadre à ses émotions, nommer leurs causes : le patron qui harcèle, les enfants qui vous abandonnent, la peur de perdre son logement, le chagrin du deuil qui ne passe pas, la maladie qui gagne et la peur de la mort, la violence du conjoint, le médecin qui ne comprend rien, la dépression qui vous épuise, la honte d’avoir raté ses examens, la culpabilité face à l’être aimé qu’on n’arrive plus à aider, l’alcool qui soulage, la tentation d’arrêter de souffrir en se suicidant…….

3,5 millions d’appels , 800 000 qui peuvent être traités, et qui dressent un portrait éclaté de notre société anxiogène: malgré les réseaux sociaux et les portables, SOS Amitié reçoit chaque année plus d’appels :  beaucoup (15%) de gens âgés qui parlent d’isolement social , surtout en milieu rural, et autant de jeunes voire très jeunes (jusqu’à 12 ans) qui évoquent via le tchat suicide, scarifications, violences familiales, harcèlement…entre les deux, 30% de personnes en pathologie mentale qui témoignent de la misère de la psychiatrie , de plus en plus d’addictions pour fuir la réalité, et toute la conflictualité du quotidien : famille, entreprise, voisinage, administration…autant de petits enfers de proximité.

Et de l’autre côté du téléphone ?  Des mots, là aussi. Mais peu : choisis, ouverts, construits autour du discours de l’appelant, avec un principe d’acceptation inconditionnelle de son discours.

Des mots qui reformulent pour encourager la parole. Qui accueillent la souffrance de l’appelant et reconnaissent sa légitimité, quelle qu’en soit la nature. Qui aident à verbaliser l’émotion perçue et à montrer qu’on a bien reçu le message : le sentiment d’injustice, l’inquiétude, la colère, la perte de repères, le besoin d’être reconnu, apaisé ou rassuré, la demande d’aide…

Et enfin, des mots d’encouragement et de valorisation, qui vont permettre à l’appelant, s’il le peut, de réfléchir à haute voix, grâce à l’effet miroir de l’écoutant, de reprendre la maitrise de sa vie et de formuler ses propres solutions, adaptées à sa situation : énoncer son projet pour pouvoir le vivre.

Et la communication non verbale ? Elle est présente et importante, elle aussi. Le timbre et le rythme de la voix, apaisants, le souffle qui calme l’angoisse, l’attention portée à l’autre et qui transparait dans la façon d’écouter, et le sourire qui s’entend aussi…même au tchat !

 
 
 

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